Qui sont les Chief Digital Officer ? Le cabinet de recrutement Haussmann Executive Search compare l’histoire de ce nouveau métier de « CDO » à celle d’un héros apparu dans une série du Netflix. En très peu de temps et depuis la nomination du premier CDO recruté par MTV en 2005, ce héros est passé d’une série pilote à un blockbuster. En 2015, le spécialiste estimait leur nombre à plus de 2000. En 2017, il est passée à plus de 3500. « Pourtant ces 4 dernières années, je pense n’avoir jamais entendu un« scénario» similaire à un autre sur les CDO, leurs rôles, leurs enjeux. Des points communs souvent, mais beaucoup de contextes différents. Un jour égérie de la transformation digitale des entreprises, un autre, sauveur investi de supers pouvoirs, le CDO fait parler, rassemble autant qu’il divise », constate Matthieu Watremez, directeur practice digital & nouvelles technologies chez Haussmann Executive Search. Le cabinet de recrutement vient d’éditer sa seconde étude après celle de 2015 sur ce poste encore mal défini mais dont la mission est de devenir le bras armé des présidents et des directions générales qui portent le changement.
En deux ans, le cabinet constate que le CDO n’est plus un mythe pour beaucoup de sociétés.
« Maintenant que plus personne ne remet en cause l’impact du digital ou du numérique, nous pouvons raisonnablement penser que la conduite du changement est engagée partout, que les CDO sont désormais les moteurs de cette transformation et qu’ils ont enfin gagné cette bataille pour une reconnaissance légitime en interne »,
expliquent les auteurs de cette étude basée sur un un panel de 250 sociétés dont le chiffre d’affaires est supérieur à 500 millions d’euros an.
Selon l’étude et sans surprise les grands pure players ont tous leur leader du digital. Dans le retail et la distribution spécialisée, les entreprises ont aussi pris conscience des enjeux de ce nouveau métier. 67% d’entre elles on recruté un leader du digital. Ce pourcentage monte à 88% dans les univers de la mode et des cosmétiques et atteint 60% dans le luxe ou la grande distribution. Le secteur de l’immobilier et de la construction reste en retard, l’automobile qui avait pris un peu de retard « est en bonne voie de rattrapage ». Les secteurs de l’énergie, de l’industrie et des technologies de pointe sont « encore en retrait » et le secteur pharmaceutique continue sa mue.
Globalement le pourcentage de départements du digital avec des ressources dédiées est en baisse sur un panel plus large de société ( 250 versus 140 dans l’étude de 2015 en incluant plus de groupes industriels, de filiales de grands groupes étrangers ) mais est à la hausse sur les CDO sur un panel identique (+6%) . Le cabinet souligne par ailleurs que la fonction a vécu un turnover avec environ 25% de renouvellement des CDO et que certains postes ont été supprimés que sur les 12 derniers mois car « leur présence n’était pas ou plus jugée nécessaire ».
« En comparant les chiffres avec les mêmes panels, l’évolution montre une croissance pour les grands groupes principalement du CAC40 et les groupes familiaux ce qui indique qu’il y a une marge de progression encore significative pour de nombreux groupes ».
De plus certaines structures n’ont pas de CDO « officiel » car elles ont déjà commencé à acter la diffusion en interne et à « répartir » le digital au sein de plusieurs directions.
Dans l’organigramme, les CDO sont encore peu nombreux à faire partie des comités de direction. Ils étaient 33% à être membres du Codir en 2015 contre 36% aujourd’hui. Les CDO les plus récents (moins d’un an à leur poste) sont le plus souvent nommés au sein d’un Comité Directeur, en particulier le COMEX. 55 % en sont membres selon l’étude.
« Cette donnée confirme la prise de conscience progressive de l’importance d’intégrer les personnes en charge de la transformation dans le peloton de tête des organisations. 9% ne font partie d’aucune instance dirigeante. De nombreux changements ont eu lieu pendant ces 2 années écoulées. Parmi les premiers CDO en poste, ceux de la « première vague », beaucoup ont quitté leurs postes et évolué. Certains pour un nouveau challenge équivalent, d’autres ont totalement changé pour aller vers le conseil, parfois rejoindre des grands groupes tels que Google, Facebook ».
En termes de rattachement hiérarchique, la fonction reste relativement proche de la direction générale dans les grands groupes. Selon l’étude 24% sont liés à la direction marketing.
« L‘intégration du digital dans une stratégie 360 degrés, plus globale est en forte croissance. La tendance se confirme encore plus fortement dès que l’on sort du CAC40. Mais contrairement à ce l’on peut penser, un positionnement parfois moins haut dans l’organigramme peut aussi être une bonne chose. Le retour de certains CDO est clair à ce sujet : pour pouvoir transformer efficacement, il faut aussi être au cœur du réacteur lorsque la direction est moins mature. Et la direction marketing, regroupant la communication 360°, le produit et la relation client est un terreau fertile au digital pour y faciliter le changement »,
estime le cabinet.
La parité homme-femme n’est pas encore totalement atteinte sur ce poste. Malgré l’augmentation du nombre d’entreprises dans le panel, les pourcentages restent stables par rapport à 2015. Sur les CDO ayant accédé à leur fonction suite à une évolution interne, seules 33% sont des femmes, contre 32% lors de recrutements externes. Le prêt- à-porter, le luxe et le secteur alimentaire et grande consommation sont ceux qui ont recruté le plus de femmes tandis que les secteurs banques et assurances sont ceux qui ont favorisé le plus les recrutements féminins en interne. Quand elles sont nommées, les femmes CDO ont aussi plus de pouvoir car 51% d’entre elles font partie d’un COMEX en 2017 (pour seulement 37% des hommes au même poste).
Les profils des CDO évoluent. Les quadras sont toujours les plus représentés dans la fonction mais la moyenne d’âge est en baisse depuis deux ans notamment sur les créations de postes. Les formations « commerciales » (écoles Hec, Essec) restent majoritaires, mais les CDO avec une formation d’ingénieur (École Centrale, Polytechnique) sont de plus en plus nombreux. Ils sont de plus en plus recrutés en externe (+9% depuis 2 ans) car les entreprises sont aussi plus nombreuses à rechercher des profils d’experts. Et les cabinets de chasse sont davantage sollicités. Enfin, il n’apparaît pas obligatoire d’être issu d’une fonction de direction digitale pour prendre un tel poste. Selon les secteurs, en particulier lors de nominations internes, beaucoup sont issus des métiers « au cœur» de l’activité.
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