Les industriels habitués à vendre leurs produits avec des forces de ventes sur le terrain ou en vente à distance doivent aussi faire leur révolution et embarquer leurs équipes dans les plans de transformation. C’est la stratégie que déploie le groupe Antalis depuis quelques années.
La transformation digitale est inéluctable pour le marché du BtoB car les clients professionnels qui achètent leurs produits sont déjà passés aux modes connectés et omnicanaux. «Nous assistons à une profonde transformation des habitudes d’achat en BtoB. 74% de acheteurs professionnels cherchent des informations sur Internet avant de parler à un commercial et 67% du processus de décision d’achat se fait aujourd’hui en ligne, sans contact avec le commercial», souligne Laure Collet, consultante en stratégie chez Altavia Aura qui a récemment co-organisé un rendez-vous en ligne sur le thème de l’acquisition de lead via le digital, avec Laurent Bourgeois, DGA de Jetpulp et Franck Chenet, directeur de la transformation digitale d’Antalis, un groupe spécialisé dans la distribution de papier, d’emballage et de support de communication visuelle. De plus la moitié de ces acheteurs BtoB feraient désormais partie de la génération des millennials et les trois quarts utilisent les réseaux sociaux dans leurs parcours d’achat. Difficile donc de les séduire avec des recettes commerciales « à l’ancienne ».
«71% des clients BtoB attendent la même expérience que ce soit pour leur entreprise ou pour eux-mêmes. Les barrières tombent. Il faut aller chercher les bonnes pratiques car le consommateur est aujourd’hui saturé d’emails, de sollicitations», ajoute Laure Collet. Mais ces professionnels connectés sont aussi friands de contenus de qualité. «Il faut que les entreprises BtoB repensent leurs modes de fonctionnement en se centrant sur les utilisateurs. Être « user centric », savoir qui ils sont, quelles sont leurs attentes, leurs problématiques au quotidien, leur rythme de travail… tout cela pour développer des services dédiés. Cette démarche va conduire à la création de « persona » (groupes ou segments cible, ndlr)». Selon la consultante, 40% des sociétés qui ont repensé leur expérience BtoB ont dépassé leurs objectifs contre 13% pour celles qui sont en retard.
Cette démarche gagnante passe par le pilotage des données issues des ventes, du CRM et par l’acculturation des équipes qui devront dénicher de nouveaux indicateurs. Elle passe aussi par de nouvelles propositions de services, par des nouveaux canaux de contacts comme Whatsapp, par des contenus orientés clients et pas forcément textuels. «Il peut s’agir de livres blancs, mais aussi de webinars plus ou moins pointus, de témoignages et de retours d’expérience, de podcasts. Les leviers d’acquisition vont servir tout au long du parcours», poursuit Laure Collet qui rappelle aussi l’importance des mots clés pour le référencement, du display et du retargeting et des stratégies de social média.
La bataille se joue sur des contenus différenciants
C’est muni de tous ces conseils et avec l’accompagnement de Jetpulp (une agence d’Altavia Aura) que le groupe Antalis continue d’opérer aujourd’hui sa transformation. «La transformation digitale est une expression fourre-tout. Je préfère aborder ce sujet sous le prisme de l’évolution des business modèles», explique Franck Chenet. Antalis qui a affiché un chiffre d’affaires de 2,1 milliards d’euros en 2019, emploie 4 700 personnes au service de plus de 115 000 clients (imprimeurs, agences de communication, architectes, industriels ou centres commerciaux) dans 39 pays et compte 117 centres de distribution. Il a été acquis il y a peu par le groupe japonais Kokusai Pulp & Paper Co, leader de la distribution de papiers au Japon, en Asie et en Australie.
« Nous enregistrons déjà un tiers de notre chiffre d’affaires en e-commerce », précise Franck Chenet. L’entreprise a déployé une plateforme de data marketing pour gérer ses campagnes multicanales avec la solution Eloqua conçue par Oracle. Pendant le confinement elle a misé sur les réseaux sociaux pour rappeler que l’entreprise restait ouverte, a déployé de nouvelles plateformes de livraison sans contact et mis en place une stratégie de contenus pour créer une plus grande proximité avec les clients. «Cette période nous a amené plus de followers et plus d’engagement».
Avant de passer en mode digital, il faut néanmoins réaliser un état des lieux et analyser la maturité du marché et de ses concurrents. «Il y a quatre ans notre maturité digitale était peu élevée et ce que l’on met en place aujourd’hui n’a plus rien à voir. Il faut aussi sécuriser ces nouveaux process. Une partie de nos clients peuvent créer leurs propres sites de vente en ligne». Le « change management » ou conduite du changement pour guider et accompagner les individus au sein de l’organisation est indispensable. «C’est la partie critique. Il faut embarquer les équipes et cela ne se fait pas tout seul. Nous avons d’abord organisé des ateliers pour des prises de conscience sur les pratiques du digital déjà présentes, puis impliqué les équipes, travaillé sur les impacts du digital sur les démarches commerciales en ligne, identifié des personas puis lancé des ateliers plus opérationnels en mixant des participants de différents services RH, marketing, etc».
Au final l’entreprise qui parlait encore très peu de clients et davantage du produit il y a quelques années, a pu identifier plusieurs personas primaires répartis sur ses différents secteurs d’activité, puis des personas plus affinés comme les professionnels de la communication visuelle ou les agenceurs de magasins, imprimeurs grand format etc. La data a été analysée et segmentée selon qu’elle soit transactionnelle, comportementale (centres d’intérêts) et liée au persona. «Notre but a été de donner un accès rapide à du contenu contextualisé. La bataille se joue là». Un professionnel qui crée son compte sur le site sera accueilli avec des contenus adaptés à ses attentes. «Adresser le bon contenu, diversifié, est un vrai challenge. C’est une arme clé de différenciation», estime Franck Chenet. Pour y parvenir l’entreprise a créé un comité éditorial et elle essaie d’anticiper la création de contenu pour qu’il soit optimisé pour tous les canaux, le site, les newsletters etc. Elle teste aussi de nouveaux leviers d’acquisitions, a intégré le social média dans ses campagnes et déployé un programme d’employés ambassadeurs avec l’aide d’Hootsuite. Désormais, elle développe aussi des programmes de « social selling » avec Jetpulp.
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