Be on Board fédère et encourage les administratrices indépendantes

Temps de lecture : 6 minutes

le rôle des administratrices est essentiel @clesdudigitalSouvent méconnu, le rôle des administratrices et administrateurs indépendants est pourtant essentiel dans les conseils d’administration. Créé par Patrycja Mothon, le Club Be on Board réunit des femmes qui ont décidé de se consacrer à cette mission.

Elles ont des parcours de cadres dirigeantes d’entreprises, investissent de leur temps ou de leur argent pour aider et soutenir les créateurs de startups et elles accompagnent et conseillent aujourd’hui les chefs d’entreprise dans le développement stratégique de leurs sociétés. Toutes ont fait le choix de devenir administratrices indépendantes et régulièrement elles se réunissent au sein du Club Be on Board.

Créé en septembre 2023 par Patrycja Mothon, directrice associée au sein de la filiale Grant Alexander Digital and Technology et elle-même administratrice indépendante au conseil d’administration de Reworld Media, ce club est un lieu d’échanges et vise «à démystifier cet univers qui parait inaccessible et mystérieux, et à comprendre les attentes des présidentes et présidents d’un conseil d’administration», selon sa fondatrice. Une fois par mois, une douzaine de personnes, administratrices et aspirantes à le devenir, fonds d’investissements, présidents et présidentes de conseils sont conviés à des diners et à d’autres événements.

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Patrycja Mothon et Anne Lange

Le 20 mars dernier, une soirée a ainsi réuni une quarantaine de personnes avec comme marraine Anne Lange, entrepreneure dans le secteur des nouvelles technologies, administratrice entre autres chez Orange, Pernod Ricard, Inditex. Avec Jessica Ifker Delpirou, operating partner chez Serena, elles ont partagé les coulisses et les enjeux des recrutements des administrateurs et advisory boards par les fonds d’investissements tandis que Lucas Perraudin, CEO de Mula Digital London, a raconté comme l’IA allait bouleverser les organisations.

Encore peu représentés dans les PME

Souvent technophiles, curieuses de tout, sensibles au développement durable, ces administratrices indépendantes sont généralement très impliquées dans leurs missions d’accompagnement et paraissent de prime abord moins portées sur la finance que leurs homologues masculins. Avec parfois des parcours atypiques, elles apportent leur regard extérieur aux dirigeants. En France, si ces profils occupent aujourd’hui une place importante dans la gouvernance des grandes entreprises, leur présence est en revanche peu développée dans les PME. Selon des chiffres de l’Apia (Administrateurs Professionnels Indépendants et Associés) publiés l’an dernier dans Les Echos, seulement 10 % des 40 000 entreprises avec un chiffre d’affaires compris entre 3 et 10 millions d’euros font appel à une administratrice ou à un administrateur indépendant. Pourtant dans son référentiel pour une gouvernance raisonnable des entreprises, l’Institut français de gouvernement des entreprises (IFGE) met en avant la mission importante et le rôle d’arbitre qu’elles et qu’ils jouent dans le fonctionnement des conseils d’administration.

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Cecile Doan

Contrairement aux membres associés, ils n’ont pas de lien capitalistique, n’exercent aucune fonction exécutive, ne sont pas en relation d’affaires avec l’entreprise et leur avis est consultatif. «Un administrateur indépendant apporte du recul, apaise les débats», assure Cécile Doan, très impliquée sur le sujet de la gouvernance des startups et qui s’est associée à Bruno Kaufmann, président de WeBoard, pour aider les jeunes pousses et les PME à constituer des comités consultatifs ou « advisory boards ». Selon le baromètre 2022 de l’IFA sur la gouvernance des startups, près d’un tiers des fondateurs interrogés sont suivis par des mentors, mais seulement 3% d’entre eux ont un rôle formel au sein du conseil d’administration. «Une gouvernance solide, que ce soit sous la forme d’un « advisory board » ou d’un « comité consultatif », puis évoluant vers un conseil de surveillance et enfin un conseil d’administration avec des administrateurs indépendants (le summum de la maturité), permet de créer des liens constructifs au sein de l’écosystème d’une entreprise», affirme Cécile Doan. Membre du bureau du Club Entreprises d’Innovation et en Croissance de l’IFA (Institut Français des Administrateurs), elle a suivi la formation SciencePo-IFA. Plus que leurs homologues masculins, les femmes semblent aussi plus nombreuses à suivre ces formations qui leur donnent les bonnes armes pour accomplir leurs nouvelles missions.

Former les entreprises

Ainée de quatre filles dont trois sont ingénieures, diplômée de CentraleSupélec, Cécile Doan a travaillé dans des centres de R&D chez Michelin, Alcatel Lucent, avant de poursuivre sa carrière chez Dassault Systèmes où elle a eu la chance de côtoyer des petits et des grands clients, des startups, de participer aussi aux acquisitions de technologies dont Sysml, No Magic et d’Argosim, indispensables pour les systèmes embarqués des véhicules. En congé sabbatique, elle conseille aujourd’hui trois jeunes pousses donc Beink, Trusli et DFM et travaille avec le startup studio OSS Venture. «J’insiste beaucoup sur les exits (sortie du capital, ndlr) qui doivent être réfléchis dès le départ par les entrepreneurs». Elle essaie d’éduquer et de former les entreprises sur le rôle des conseils d’administrations, souvent confondus avec les boards d’actionnaires, et sur celui des administrateurs indépendants qui sont «de parfait médiateurs, ont un rôle clé en matière sociale et sociétale».

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Emmanuelle Pierga

Un avis que partage Emmanuelle Pierga, aujourd’hui présidente de Tandem Com Santé et administratrice indépendante. Elle a commencé sa carrière chez France Télécom devenu Orange, a bifurqué dans l‘univers de la santé quand l’opérateur a créé sa première verticale Orange Healthcare et s’est lancée dans l’entrepreneuriat. Aujourd’hui elle accompagne les jeunes pousses de la santé numérique. «Ce secteur s’est digitalisé sur le tard. Mais aujourd’hui tous les sujets sont concernés, que ce soit les parcours de soin, de la consultation, la gestion des flux. Il y a les startups de la Biothec, de la Medtech et des éditeurs de logiciels, soit plus de 2600 entreprises en France. Je les accompagne sur la partie notoriété», explique Emmanuelle Pierga. Ancienne étudiante au CNAM et membre du jury, elle a aussi suivi une formation d’administratrice à l’EM Lyon. «Les mandats se font beaucoup par cooptation et les grands groupes passent parfois par des chasseurs de tête. Être membre du club Be on Board m’apporte du réseau, m’aide à passer de la théorie à la pratique. Les femmes ont aussi très souvent l’impression qu’elles doivent continuer à faire leurs preuves. Plus on monte dans la hiérarchie et plus c’est vrai», estime l’entrepreneuse qui recherche un mandat pour 2025.

Apporter une vision

Avec son parcours atypique, Florence Jeantet cherche elle aussi à casser les codes et à briser ce plafond qui freine encore les femmes, mais aussi les catégories sociales moins favorisées dans leur désir d’accéder à ces fonctions clé. «Je suis un pur produit de l’ascension sociale», affirme cette ingénieure agro-alimentaire de formation, fonceuse et fascinée par l’humain. Aujourd’hui membre du board de SIG Group, elle a commencé sa carrière chez Unilever par un stage au département qualité de l’usine du thé Eléphant et a très vite compris les conséquences des prises de décisions des dirigeants sur le personnel en bout de chaine. Dans cette multinationale elle a changé de postes et de services, du développement produit au marketing et à l’innovation, a voyagé de Marseille à Paris en passant par Poitiers et jusqu’à Moscou où, jeune trentenaire, elle a été chargée de démarrer une usine. Elle est passée aussi par des phases de restructuration de programmes européens aux Pays Bas avant de retourner à l’innovation et à la R&D chez Danone et de plonger dans la biodiversité. Elle a notamment contribué au lancement de la coalition multisectorielle OP2B (One Planet Business for Biodiversity), en est devenue directrice générale avant d’être nommée SVP Chief Sustainability Officer du groupe Danone en 2022.

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Florence Jeantet

«Je suis une hyper active», avoue cette cadre dirigeante qui, elle aussi, a suivi une formation SciencePo-IFA pour devenir administratrice indépendante et a été admise au Women on Boards Program de Harvard Business School. «Quand j’ai quitté Danone, j’avais déjà commencé à réfléchir sur les gouvernances des entreprises. C’était la suite logique de ma carrière après 20 ans d’exécution», estime Florence Jeantet.

Aujourd’hui senior advisor chez VIVAE,  elle apporte aussi son aide à sa maman dans l’exploitation agricole familiale et son soutien aux élèves de son ancien lycée dans l’Ariège car elle juge important de leur donner les bons codes pour réussir. «Je participe aux rendez vous Club Be on Board et j’apprends en écoutant. C’est extrêmement riche et lorsque qu’on a passé 18 ans à l’étranger, il faut des contacts», ajoute Florence Jeantet dont le «drive» est d’accompagner et d’aider. «Le rôle de l’administrateur indépendant c’est d’être au service des entreprises, des investisseurs, de comprendre la culture de l‘entreprise, ses comptes, son business model, son univers de concurrence et d’apporter cette vision un peu plus large, d’éclairer, de trouver la bonne ligne de crête.»

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