Le groupe Fauchon a retrouvé des couleurs et repris le chemin de la croissance. Après un placement en redressement judiciaire en 2020, la fermeture de ses principaux magasins place de la Madeleine, il a – comme il l’indiquait dans un communiqué – «entamé une nouvelle page de son histoire».
La maison Fauchon détenue par Michel Ducros qui la dirige avec Samy Vischel, est redevenue rentable, ouvrant des nouvelles boutiques, dont des points de vente dédiés aux thés et infusions à la Madeleine et dans le quartier du Marais. Elle a inauguré une école à Rouen en 2022, s’est déployée à l’international avec des magasins mais aussi des hôtels et relance son activité de traiteur événementiel en partenariat avec Grand Chemin Traiteur.
«Tout le monde connaît la marque Fauchon. C’est une maison qui va avoir bientôt 140 ans. C’est le luxe et l’art de vivre à la française, une maison qui s’est bâtie avec des hommes et des femmes qui ont souhaité transmettre l’excellence culinaire à travers le monde», raconte Pauline Lamare, directrice e-commerce et CRM de Fauchon présente au dernier salon One to One Retail E-commerce à Monaco. «Nous nous sommes concentrés sur nos forces produits, notre savoir faire dans l’épicerie fine, le thé, le macaron, le chocolat, les cadeaux, et c’est une maison qui se modernise et accélère dans le digital depuis quelques années avec un objectif de préserver notre héritage plus que centenaire». Le groupe comptabilise 62 boutiques et restaurants à l’international, six en France et un corner aux Galeries Lafayette. Il développe aussi une activité BtoB de cadeaux d’affaires, un site e-commerce qui pesait déjà 15% de son chiffre d’affaires en 2021 et affichait une forte croissance après un virage numérique à 360°. L’ambition est désormais de renforcer encore l’expérience client en ligne.
Augmenter la fréquence d’achat
Le challenge de la maison c’est aussi de sortir de l’activité saisonnière liée aux achats à Noël, de faire revenir plus souvent les clients sur le site et en magasin. «Nous n’avions pas forcément les données pour identifier ce client qui a le goût de la gastronomie, qui va bénéficier d’une sorte de reconnaissance en offrant Fauchon. L’enjeu est de mettre le client au centre et se tourner vers l’omnicanalité». Pour sa stratégie de gestion de la relation client, la marque a commencé par s’équiper de la plateforme de «marketing automation» de Splio dès 2017. Il s’agissait d’abord de centraliser les données e-commerce et d’animer cette base de données clients. Ensuite elle a voulu créer, toujours aidée par Splio, une relation plus durable avec un programme de fidélité «Fauchon le Club». Enfin elle vient de déployer la CDP ou «Customer Data Platform» de l’éditeur. Cette CDP destinée à créer une base de données client unique à partir d’informations online et offline collectées via plusieurs sources, est connectée au logiciel de caisse Orchestra Software et au CMS Magento (Adobe) qui équipe le site. Le but est de développer des «scénarios avancées, avec une personnalisation accrue et une connaissance client augmentée».
«Notre stratégie se base sur trois axes. Il s’agit de communiquer sur le produit Fauchon à offrir et à s’offrir en mettant le client au centre. Jusqu’à présent nous communiquions davantage sur la marque voire le produit. C’est aussi les fidéliser, les faire revenir plus d’une fois par an et leur donner la possibilité d’aller sur l’ensemble de nos canaux de distribution. L’objectif est d’augmenter la fréquence d’achat et le panier moyen, de désaisonnaliser un peu notre activité car plus de 50% du chiffre est réalisé sur le mois de décembre». La maison cherche ainsi à créer d’autres rendez-vous : cadeaux pour les maîtresses d’école en fin d’année, anniversaires, remerciements et félicitations… «Le message c’est de s’offrir des plaisirs toute l’année car nous ne vendons pas que des produits ultra chers. Il y a aussi des articles à tarif abordable».
Campagnes ciblées et différenciées
La nouvelle approche a consisté à envoyer des newsletters hebdomadaires. Elle s’accompagne d’une petite vingtaine de campagnes de « trigger » (marketing de déclenchement) pour favoriser l’achat et le ré-achat au cours des «marronniers» ou d’autres événements du cycle de vie des clients. Le contenu éditorial apporte des conseils sur l’usage des produits, sur leur conservation, par exemple. «La campagne envoyée aux contacts parisiens en décembre 2023 qui parlait de notre produit phare, une bûche de Noël disponible uniquement en retrait en boutique pendant quatre jours, a enregistré un taux d’ouverture de 30% et de conversion de 4,55».
Autre exemple : celui d’une campagne de réactivation de clients acquis en 2020 au moment du Covid et alors que les boutiques étaient fermées. La campagne au ton promotionnel avec l’utilisation d’un compte à rebours pour indiquer qu’il ne leur restait que 24 h pour commander le produit a enregistré un taux d’ouverture de 55% et de conversion de 5,52%. La marque cite aussi l’exemple d’une campagne post-achat, cette fois pour du foie gras, qui se base donc sur le contenu de l’achat du client sur le site ou en boutique. «Deux jours après son achat, nous donnons des conseils de dégustation et de conservation. Ce combo nous a donné des indicateurs plutôt positifs et prometteurs avec des taux de conversion de 7,14».
Un programme de fidélité très personnalisé
Avec cette stratégie éditoriale, l’automation, la segmentation des campagnes qui fait gagner en personnalisation et en conversion, tous les indicateurs sont en hausse entre 2022-2023. En 2024, l’objectif de la marque est d’identifier les meilleurs clients pour mieux les adresser et personnaliser les communications grâce notamment au programme de fidélité désormais omnicanal. «C’est un programme de fidélité assez simple avec un euro égale un point et trois statuts qui font écho à la gastronomie : amateur, initié, passionné. Les avantages se cumulent au fur et à mesure des statuts. Quand vous êtes amateur, vous avez un cadeau à l’arrivée et puis certains avantages et au fur et à mesure que vous changez de statut vous obtenez des avantages supplémentaires comme une journée privilège pour les initiés et la possibilité d’avoir la livraison offerte sur le site pour les passionnés». Les membres sont recrutés de façon assez classique avec des encarts dans l’ensemble des communications, sur le site et lors de la création de comptes, et lors de campagnes automatiques et régulières auprès des prospects. «Tout est paramétrable dans la plateforme de Splio et nous avons la main si nous décidons de changer les règles. Nous sommes totalement autonomes sur ce programme». Les clients fidèles sont aussi décisionnaires de leur programme, choisissent les cadeaux qu’ils souhaitent, le jour où ils désirent utiliser leurs avantages tout au long de l’année.
Engager le personnel des boutiques
Là encore les « Welcome », « Journées Privilèges » offrant 10% de remises, les campagnes post-achat ont apporté les résultats escomptés. «Les indicateurs sont vert fluo et le ROI plus que positif.» Dans cette stratégie marketing très ciblée avec un traitement différencié entre membres du programme et non-membres, le programme de fidélité a montré son efficacité avec notamment une différence de panier moyen de 50% entre les deux populations, un délai entre les commandes qui s’est réduit de 14 jours (il est aux alentours de 50 jours pour les non-membres), une fréquence d’achat qui a augmenté. La base de clients affiche quant à elle une croissance de plus 6% en 2023 et les performances des campagnes de plus quatre points en moyenne sur la partie ouverture et de trois points sur les taux de clic. «Le défi qui n’était pas facile à relever, était d’engager le personnel des boutiques sur l’importance de la donnée client, l’importance de la récolter.»
Avec le déploiement de la CDP, les résultats devraient être «encore plus intéressants cette année. L’un de nos enjeux est effectivement de mieux connaître nos clients, d’analyser leur comportement d’achat pour améliorer les taux de conversion en fonction de leurs préférences, notamment». Il est aussi de suivre la performance de chacune des campagnes à travers des tableaux de bord. «Nous sommes déjà en train de travailler sur la partie segmentation RFM en temps réel (segmentation des clients en fonction de la récence avec la date de dernier achat, de la fréquence et du montant, ndlr). Nous allons vers plus de personnalisation, le développement de scénarios automatisés. Nous avons par exemple créé l’agrégat «cadeauphile». Nous allons aussi toucher les contacts qui ont des anniversaires dans les mois à venir avec des audiences « Lookalike » ( sur Meta et Google… après avoir beaucoup construit autour du e-commerce l’idée est d’attaquer sur l’angle omnicanalité».
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