Le spécialiste de l’immobilier JLL France analyse l’impact des ventes e-commerce sur le développement des magasins dans un document intitulé « E-Commerce : destructeur ou disrupteur d’immobilier physique ? ». Il en ressort que, en dépit du développement du e-commerce (il pèse 8,5% du commerce de détail en 2017 selon la Fevad avec l’Insee), le nombre de points de vente et la surface commerciale ont fortement progressé au cours de ces dernières années. L’équipement commercial français est ainsi passé de plus de 31 000 points de vente en 2005 à près de 47 900 en 2017, représentant une évolution des surfaces commerciales de 39 millions de m² à près de 56,5 millions de m².
Le spécialiste note que le nombre de points de vente a évolué plus fortement que les surfaces (+52 % contre +43 % pour les surfaces de vente). A ce titre, les surfaces moyennes sont donc passées de 1 250 m² en 2005 à 1 180 m² en 2017.
« Le nombre de boutiques et les surfaces ont presque toujours connu une croissance positive depuis 2005. En revanche, on note un ralentissement à partir de 2011 : avant cette date, leur croissance (tant en nombre qu’en surface) tendait à dépasser les 5 % par an alors qu’à partir de 2011, exception faite pour 2016, le taux de croissance ne franchit pas la barre des 3 % ».
Ces progressions varient bien sûr selon les zones géographiques, les courbes démographiques de la région, la taille des villes, ou les typologies d’enseignes. Selon ses observations, les enseignes augmentent leur maillage territorial au détriment de la surface de leurs espaces de vente pour contrer l’effet « impact de masse » du web.
« En augmentant le nombre de points de vente, les enseignes se rapprochent au plus près de leurs clients et créent donc plus de fidélité ».
L’équipement en centres commerciaux ne cesse aussi de s’accroître d’année en année. Si ces espaces ont accusé le coup de la montée du e-commerce aux États-Unis, ce phénomène ne semble pas encore être visible en France car selon JLL
« les centres commerciaux français s’adaptent afin de fournir aux consommateurs une véritable expérience shopping, être un lieu de vie, de distraction, à l’image des centres-villes ».
Si la montée en puissance du e-commerce n’a pas que des effets positifs, notamment du point de vue du commerce traditionnel, JLL rappelle également qu’il a permis la création de nouveaux emplois et de nouvelles surfaces physiques comme les « drives » (fin 2017, plus de 3.000 drives équipaient le territoire, représentant plus d’1,2 million de m²). « On peut ainsi dire que le drive est l’une des activités qui a connu la plus forte croissance et ce, grâce au e-commerce ».
L’un des secteurs les plus touchés par la montée du e-commerce est celui de la banque. L’Observatoire de l’image des banques révèle que près d’un Français sur deux se rendait dans une agence bancaire au moins une fois par mois en 2010, contre 20 % cinq ans plus tard. L’essor de nouvelles banques dématérialisées a porté un coup aux réseaux d’agences bancaires physiques.
« Conséquence de cette baisse de fréquentation, les organismes bancaires ont dû et continueront à rationaliser leur réseau, soit au travers de regroupements d’agences, soit par des fermetures. Les chiffres sont d’ailleurs sans appel : la BCE a relevé une baisse de près de 4 % du nombre d’agences bancaires en France entre 2010 et 2016, passant de plus de 38.700 agences à près de 37.250. Et ce phénomène devrait continuer dans les années à venir ».
Nombre d’organismes bancaires ont d’ailleurs annoncé de multiples fermetures à horizon 2020 : 300 agences pour la Société Générale, 200 pour la BNP, 400 pour la BPCE ou encore entre 250 et 280 pour le LCL. La situation des agences bancaires peut également être mise en parallèle avec les agences de voyage, qui ont basculé d’un modèle de commerce traditionnel à des modèles purement digitaux. Selon les chiffres publiés sur le site Resaconseil, près de 77 % des français indiquent avoir préparé leur voyage sur internet et 49 % d’entre eux affirment avoir réservé directement en ligne. Autre secteur impacté par la croissance des ventes en ligne : celui du jouet.
« Pour se parer au mieux mais également bénéficier de la croissance des ventes en ligne, nombreux sont les distributeurs de jouets à avoir ouvert un site internet en complément de leurs implantations physiques. Malgré ces efforts, les pure-players continuent de gagner du terrain, empiétant de plus en plus sur les résultats des grands distributeurs spécialisés : les plus redoutables sont d’ailleurs Amazon et Cdiscount ».
En seulement quatre ans, la part de marché de l’ e-commerce dans le marché du jouet, est passée de 13,9 % en 2014 à plus de 20 % en 2017, selon les derniers chiffres de la FJP (Fédération Française des industries Jouet et Puériculture). Selon les estimations de JLL le marché français du e-commerce dans le secteur du jouet pèse ainsi pour près de 680 M€ en 2017, contre près de 450 M€ en 2014, soit une augmentation de résultat de l’ordre de 51 % en quatre ans. D’autres points de vente ont également pâti de l’évolution du e-commerce et de la digitalisation. C’est le cas, par exemple, des magasins de location de vidéos, la digitalisation les ayant achevés.
Mais l’essor du e-commerce n’aura pas sonné le glas du commerce physique, loin de là, rappelle le spécialiste de l’immobilier qui dresse aussi dans son rapport tous les atouts (la liste est longue ! ) dont dispose aujourd’hui les enseignes « pour rester dans la course, conquérir et fidéliser des consommateurs toujours plus agiles, volages et informés ».
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