Laboratoire technologique, Decathlon Digital fait naitre des solutions au service des équipes métier et des clients de l’enseigne comme un moteur de pricing dédié aux produits de seconde vie.
Decathlon bénéficie d’une longueur d’avance en matière de rachat et de revente de produits d’occasion. Sa démarche a commencé dès 1986 avec ses événements Trocathlon installés sur ses parkings. Cette année, l’objectif de l’enseigne est de racheter et de revendre 210 000 produits en France. Une goutte d’eau encore pour le groupe qui opère 1 750 magasins dans 70 pays. Mais le chantier avance. Il est intégré dans ses objectifs RSE, sa volonté de favoriser l’économie circulaire, d’améliorer la durabilité et la réparabilité de ses produits, de valoriser la location (aujourd’hui 7 à 9% de ses produits sont ouverts à la location) et au final de transformer toute son organisation. Cette démarche passe aussi par la digitalisation de ses process avec la création d’un département Decathlon Digital qui réunit aujourd’hui plus de 3000 experts au service de l’innovation, des ingénieurs, des spécialistes de la cyber sécurité, des ingénieurs en machine learning, des datas scientists, et qui abrite des «Factory», pour le développement des produits autour de l’analytics, de la business intelligence, de l’Intelligence Artificielle au service des métiers et des 105 000 collaborateurs du groupe.
«Aujourd’hui l’IA est un «enabler» (ou facilitateur, ndlr) de nos process. Sur internet, par exemple, 80% des recommandations personnelles sont issues de nos algorithmes. Nous travaillons avec l’IA dans la supply chain pour optimiser nos prévisions, dans la logistique pour optimiser la distribution dans les entrepôts, dans les magasins pour sélectionner les meilleurs produits à mettre en rayon, mais aussi pour trouver les meilleurs prix pour les produits», énumère Hugo Hamad, directeur de l’Intelligence Artificielle et responsable de la AI Factory chez Decathlon. C’est cette AI Factory interne qui s’est notamment penchée sur la création d’un moteur de pricing pour les produits de seconde main. Un projet complexe qui a mobilisé plusieurs équipes dont la «data value team» qui travaille comme son nom l’indique sur la valeur des cas d’usages et l’équipe AI de l’Innovation Lab, chargée pour sa part des sujets innovation et R&D pour «disrupter les process», comme l’a raconté Corentin Vasseur, ingénieur machine learning lors d’une conférence à l’occasion du salon Big Data & AI Paris.
Un modèle d’IA qui s’adapte à des changements de contexte
Aujourd’hui Decathlon propose de racheter les produits de seconde vie via des bornes en magasin pour estimer les prix de rachat, appuyées par des conseillers ou directement depuis le site Internet. La simulation est effectuée selon plusieurs critères prédéterminés et des règles définies jusque là par les experts métier. «Nous voulions travailler sur une solution plus performante et stable, disposer un modèle qui puisse s’adapter à des changements de contexte», explique Corentin Vasseur. «Nous avons d’abord sollicité les métiers pour travailler la structure opérationnelle puis sur les process», précise-t-il.
Plusieurs étapes ont été définies : problèmes à résoudre, construction de la solution, déploiement dans des environnements de production, monitoring en temps réel… «Nous avons mis en place une équipe pour développer ces produits d’IA avec différents profils dont des « data value engineers » pour estimer la valeur du produit, des product managers pour gérer le cycle de vie du produit, son évolution, des data scientists, des datas engineers machine learning et des compétences aussi plus classiques pour le développement des logiciels. Il faut également une équipe autour de la data platform pour mettre à disposition des données, l’infrastructure technique, des services, des bonnes pratiques pour être efficace et rapide».
Une fonction de coût est basée sur différents modèles de machine learning
Avec cette organisation, l’objectif de l’enseigne est de construire un moteur de pricing capable d’estimer le prix de rachat du produit et le prix de revente, de trouver le juste prix en maximisant la marge après reconditionnement et stockage. Il est aussi de convaincre le consommateur avec un prix juste pour qu’il privilégie le circuit Decathlon plutôt qu’un autre canal. «La formule de cette fonction de coût est basée sur différents modèles de machine learning. L’un pour estimer la probabilité de rachat du produit par un client. Un deuxième modèle va estimer le coût de reconditionnement du produit, l’autre le coût de stockage… cette décomposition va nous aider à construire notre moteur de pricing qu’il faudra ensuite rendre disponible et mettre en production».
Si le développement logiciel est un domaine mature, son utilisation dans un environnement technique et sa mise en production de façon industrielle s’avère plus complexe et réclame de l’agilité. «Ce qui est important au final c’est de considérer un modèle comme un service. Quand on crée un modèle d’IA, il faut se demander quel est l’outil, le service qui va utiliser ce modèle (…). Tous les critères de qualité de l’API que l’on est en train de développer doivent être pris en compte et monitorés pour répondre aux promesses faites aux utilisateurs». Chez Decathlon, les APIs du site web doivent, par exemple, répondre en 200 millisecondes.
«Nous avons besoin de développer des produits IA avec tout le service qui va avec mais aussi tous les outillages qui vont permettre aux équipes de diagnostiquer, de monitorer, de rapidement gérer les problèmes en production, ajoute Hugo Hamad. Et nous avons aussi des enjeux d’adoption. Il faut des produits performants, industriels. Il faut penser à délivrer des expériences à nos clients et à nos utilisateurs, pas seulement délivrer un projet, un package, un modèle de machine learning. L’enjeu est d’aller chercher des ambassadeurs chez les métiers, pour les entrainer sur ces produits, les rendre autonomes, leur expliquer comment cela génère de la valeur pour le business», poursuit le responsable ajoutant que Decathlon développe une démarche «nativement industrielle» en limitant sa dette technique au maximum. Hébergée sur le cloud, via Amazon Web Services et Google Cloud Platform, le moteur de pricing en production bénéficie d’un monitoring en temps réel et d’un système d’alerte pour prévenir la dérive de son modèle.
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