L’enseigne Bureau Vallée déploie toujours des projets au service de ses franchisés dont une nouvelle initiative à base d’IA générative qui a tenu ses promesses selon l’entreprise.
Née il 30 ans sur le modèle du cash and carry, l’entreprise de papeterie familiale Bureau Vallée avance à grands pas dans la modernisation et la digitalisation de son réseau. Forte de 400 magasins dont 320 en France métropolitaine, exploités principalement en franchise, elle enregistre un chiffre d’affaires de 750 millions d’euros dont 30 millions d’euros pour le e-commerce. Le site lancé en 2013 affiche une croissance annuelle de 40%. Il a été conçu dès le départ comme un canal au service des magasins qui sont connectés à une plateforme de stock unifié pour le déploiement de services omnicanaux.
Le pic d’activité est particulièrement marqué en période de rentrée scolaire. Pour aider franchisés et clients à faire face à ce rush des courses, l’entreprise a pris plusieurs initiatives dont la plus récente, co-construite avec son partenaire Decade, fait appel à l’IA générative. «Cela fait 11 ans que l’on cherche une solution pour aider les parents à en finir avec la corvée des courses liées aux listes scolaires. Nous avons commencé par leur proposer de déposer ces listes sous format papier dans nos magasins et de repasser quelques heures plus tard, le temps que les vendeurs en magasin les préparent. Puis, nous avons développé un petit outil sur le site pour l’envoi de pièces jointes pour reproduire ce qu’on faisait en magasin», raconte Emeric Caramico, directeur omnicanal de Bureau Vallée. Quelque temps plus tard, l’enseigne lance un nouveau projet consistant à récupérer en local les listes scolaires des nombreux établissements pour ensuite les convertir en besoins et rattacher ces derniers aux articles du catalogue. Au final, «ce projet un peu fou» est un échec mais l’idée poursuit son chemin. «Il y a plus 60 000 établissements scolaires en France, avec plusieurs niveaux et pour chacun il y a des enseignants avec des listes différentes sans compter les besoins spécifiques. Nous avions mal évalué la montagne de travail que cela nécessitait pour parvenir à un résultat satisfaisant. Il fallait changer d’échelle et l’IA nous a permis de le faire et d’atteindre un résultat dans un temps record, un résultat que l’on n’espérait même pas», insiste Emeric Caramico.
Création d’une cellule innovation en interne
Le projet a démarré il y a quelques mois avec Decade et un expert de l’IA. Si la roadmap est déjà écrite, l’enjeu est multiple. Decade, prestataire de Bureau Vallée depuis environ trois ans, doit commencer par s’approprier l’idée. L’approche de co-construction doit embarquer aussi des franchisés. «Tout s’est fait naturellement. Nous avons créé un petit noyau dans notre entreprise, composé de deux à trois franchisés, de représentants de l’e-commerce et des personnes de Decade. Cette petite cellule d’innovation, façon start-up, a mené des tests avec enthousiasme. Nous savions que si cela fonctionnait, les retours de notre réseau seraient très positifs», poursuit Emeric Caramico. L’équipe «très agile» multiplie les tests avant de faire des annonces avec la volonté de bien maitriser les investissements. Le projet va durer cinq mois mais avec une charge de travail effective d’un mois. «La direction générale qui était dans la confidence nous a laissés travailler un peu dans l’ombre et nous avons attendu trois mois pour être quasiment convaincus que nous serions au rendez-vous de la rentrée des classes. C’est à ce moment-là que nous avons organisé un séminaire avec tous nos franchisés. Le retour de la salle, très positif, nous a mis aussi une pression monstrueuse. C’est un projet d’innovation et il y avait le risque que cela ne fonctionne pas.»
Un panier constitué en quelques minutes
Concrètement la solution qui a été imaginée comprend un module sur le site dans lequel les parents d’élèves téléchargent la liste de fournitures de leurs enfants après l’avoir prise en en photo via leur mobile. Ils peuvent aussi renseigner des options et les préférences de leur enfant. L’IA générative avec le modèle ChatGPT entre ensuite en jeu et le panier est constitué en quelques minutes. Techniquement, la plateforme est opérée et motorisée par API sous Adobe Commerce et les requêtes sont envoyées au moteur de recherche Algolia. «Les clients ont le choix de rester sur la proposition par défaut ou de changer s’ils veulent par exemple une marque particulière. Ils valident leurs paniers en deux minutes alors que dans la vraie vie cela leur prendrait 45 minutes en magasin, et je ne compte pas le temps d’attente», estime Emeric Caramico.
L’importance du moteur de recherche
Pour déployer ces nouveaux parcours en ligne, plusieurs difficultés majeures ont cependant être surmontées. Il s’agissait dans un premier temps de «faire accepter l’incertitude aux acteurs du projet, aux informaticiens, au réseau face à la deadline de la rentrée qui ne peut pas être décalée». En plus de l’incertitude côté métier, il y avait aussi une incertitude côté technologique liée à cette innovation. «Mais nous avions un plan B. C’était la solution où l’on propose toujours aux clients d’envoyer leurs pièces jointes directement aux magasins et qui répond aussi à cette problématique des parents.» L’autre difficulté était liée à la «créativité des professeurs» dans la formulation de leurs listes de fournitures, parfois pleines d’éléments qui viennent polluer l’interprétation de l’IA. «Une liste scolaire simple n’existe pas. Il peut y avoir des options dans tous les sens comme, par exemple, la demande d’un bâton de colle mais qui ne coule pas pour l’enfant en 4e.» Il s’agissait ainsi «d’accepter cette part d’incertitude tout en la maitrisant.» Pour y parvenir les équipes de Bureau Vallée ont multiplié les tests avec les listes scolaires de leurs enfants, ceux de leurs amis ou voisins. «Nous étions dans une démarche d’amélioration continue du prompt même quand on a été en production. Nous avons testé des centaines de listes scolaires.» Decade a par ailleurs mis à disposition une interface pour que le prompt puisse être corrigé en production. «Il fallait toujours être agile, s’adapter car les choses évoluent très vite. Du jour au lendemain, une nouvelle version de ChatGPT est sortie et il fallait adapter le parcours client en ligne car tout devenait plus rapide. C’est une évolution permanente tout au long du projet. L’IA en est l’une des briques mais disposer d’un bon moteur de recherche est aussi très important.»
Une croissance du chiffre d’affaires en ligne de 63%
Au final, ce projet scolaire a permis à l’enseigne d’accélérer le travail d’optimisation du moteur, de mettre en place les bons synonymes et niveaux sémantiques pour obtenir les bons résultats. «Nous avons réussi à «gamifier» l’optimisation du moteur de recherche.» Les résultats sont au rendez-vous. La rentrée des classes a été un bon cru pour le site de Bureau Vallée qui a enregistré une croissance de 63% de son chiffre d’affaires en août. «Les retours clients sont positifs et l’image de l’enseigne est rajeunie. Nous avons fait plus de 6000 listes scolaires via le module e-commerce pendant l’été avec des paniers moyens à 70 euros. L’autre effet secondaire inattendu c’est que nos équipes magasins sont aussi nombreuses à l’utiliser pour préparer plus rapidement les listes scolaires qui leur sont toujours déposées en magasin». D’autres projets liés à l’IA «qui peuvent apporter une valeur ajoutée importante» sont en cours. «Notre ADN c’est de faire en sorte que la technique soit au service du business», souligne Emeric Caramico.
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