Directrice e-commerce et de l’expérience digitale chez Carrefour et responsable de la Digital Factory, Valérie Legat a très vite détecté le potentiel immense qu’offre Internet.
De sa jeunesse passée aux États-Unis, Valérie Legat garde l’idée que tout est possible. Entrepreneuse dans l’âme, elle n’envisageait sans doute pas intégrer un groupe de distribution mondial lorsqu’elle entamait ses études. Pourtant depuis un peu plus de deux ans, Valérie Legat est directrice e-commerce et de l’expérience digitale chez Carrefour. Une fonction pour laquelle elle ne compte pas son temps et qui la passionne. «Je suis dans la construction, portée par ma mission», raconte la responsable qui a pris la direction de la Digital Factory e-commerce de Carrefour pour la France début 2022.
Après ses années de lycée, Valérie Legat s’oriente vers l’ESC Nice (aujourd’hui Skema Business School) en vue d’intégrer HEC, voie royale pour se lancer dans l’entrepreneuriat. «Déjà nous avions eu le projet de lancer une entreprise à Montpellier avec plusieurs copains sous le nom de Rest’Home, une sorte d’Uber Eats avant l’heure. Nous avions acheté une mobylette pour livrer des commandes de pizzas et de plats chinois. Mais j’ai du faire un choix car j’étais admissible en école de commerce». Quelques temps plus tard son désir d’entreprendre passera tout de même devant celui de rejoindre les bancs de la plus célèbre école de commerce française. «En dernière année, je suis partie en stage en Thaïlande avec mon compagnon, devenu mon mari depuis. Nous étions au début de l’Internet mais très vite nous avons vu les possibilités qu’offrait ce réseau de se connecter au monde», raconte Valérie Legat qui décide alors avec son partenaire d’aider les entreprises à se brancher sur la Toile. Leur premier client s’appelle Essilor. «Je me souviens avoir montré à une collaboratrice de l’entreprise comment fonctionnait l’email. Le premier envoi s’est passé entre elle et une personne qui se situait dans un bureau d’un autre étage. C’était magique. Le patron d’Essilor nous avait déjà conseillé d’en faire notre métier».
Valérie Legat a appris à coder et s’est formée aux réseaux. Rapidement, elle a construit un premier site web avec son mari puis commencé à travailler dans une SSII où elle contribue à concevoir un extranet. «Je ne voulais surtout pas me retrouver à ne rien faire». Mais la jeune femme qui dispose alors d’une adresse mail ImagiNet, un nom devenu collector chez les premiers internautes français, a mis son CV en ligne. Une démarche rare que l’agence Ogilvy repère. Le groupe publicitaire veut monter une structure dédiée au digital. Valérie Legat a le bon profil. Elle intègre l’agence tout créant un premier site e-commerce destiné à vendre des produits provençaux aux Japonais. «Mais après réflexion, je me suis rendue compte que ce qui m’animait, ce n’était pas de devenir une commerçante. C’était conseiller, défricher… nous avons fermé le site «Provence village» puis fondé un cabinet de conseil». Business Lab voit le jour en 1998 avec des soutiens du cercle «friends and family» qui mettent 600 000 francs (91 463 euros) dans la corbeille.
Carrefour parmi les premiers clients
L’agence de conseil stratégique en marketing interactif démarre fort. Ses premiers clients s’appellent Le Printemps, TF1, Air France mais aussi Carrefour. «Ce sont ces gros clients qui ont lancé l’agence. Nous avons aussi eu la chance de rencontrer Paul-Émile Cadilhac qui nous a fait confiance», souligne Valérie Legat. Pionnier du web, ancien cadre dirigeant du groupe PPR, Paul-Émile Cadilhac a été directeur Internet du Printemps en 1998. Aujourd’hui co-fondateur de la plateforme On The Net TV, il rejoindra Business Lab en 2000 et y restera deux ans en qualité de directeur associé, en charge du pôle Conseil. «A cette période, tout était limpide. Nous avions déjà une vision sur ce qu’allait devenir le Net merchandising tel qu’il était nommé à l’époque». En 2000, Business Lab réalise sa première importante levée de fonds de 8 millions de francs (env 1,2 million d’euros). Mais la Web agency subit de plein fouet la «bulle internet» et la crise des startups perdant du même coup quelques gros clients dont Le Printemps. Quelques années plus tard, l’agence sera vendue au groupe de communication Venise devenu depuis Arneo.
Une feuille de route internationale
Pendant ce parcours Valérie Legat croise aussi la route de McKinsey qu’elle rejoint en 2016 comme associée expert et co-leader des McKinsey Digital Labs. «Le cabinet voulait apprendre, délivrer des expériences dans le numérique. J’avais moi-même besoin de sortir de ma zone de confort, de redécouvrir le monde du salariat. J’ai monté deux «practices» sur le design et l’innovation et le digital business building. Ce furent quatre années formidables». Mais quand Amélie Oudea-Castera alors group chief customer, digital and marketing officer de Carrefour lui propose de rejoindre le distributeur, c’est un véritable «coup de foudre» qui s’opère. Valérie Legat qui s’est aussi prise de passion pour le retail n’hésite pas. «C’est un momentum extraordinaire autour du digital chez Carrefour. J’ai rejoint le groupe pour l’accompagner sur sa stratégie digitale dans neuf pays, lancé le service e-commerce «Les Essentiels Carrefour», la vente en ligne pour le non-alimentaire et le site de Supeco».
Ses missions se sont progressivement élargies. Rattachée à Élodie Pertuisot, chief e-commerce, digital transformation and data officer, Valérie Legat travaille aujourd’hui aux côtés de plus de 540 personnes au sein de la Digital Factory. «Mes journées sont bien remplies et commencent très tôt pour se finir à 21 heures voire 23 heures. Je n’arrive pas à débrancher. Le dernier salon One to One Monaco auquel j’ai participé a d’ailleurs été comme une bouffée d’oxygène». Valérie Legat a encore beaucoup de choses à accomplir chez Carrefour. «J’ai une longue feuille de route. Il y a encore des choses à faire au niveau des pays, des améliorations à apporter sur le site en terme de NPS notamment». Le temps lui manque pour s’adonner à ses passions comme la sculpture sur béton cellulaire, la peinture ou le piano . «Je prends le temps de jardiner le matin. Patouiller dans la terre pendant une demi-heure m’aide à mettre de l’ordre dans mes idées». Mais ce sont ces trois filles âgées de 17 à 20 ans qui sont prioritaires et qu’elle emmène en voyage avec son mari qui lui-même a repris le chemin de la création d’entreprise et monte actuellement une start-up. «J’essaie de transmettre à mes filles le sens de l’engagement, du travail, de la loyauté, tandis qu’elles me poussent à me questionner sur l’impact social du digital. Je n’y pensais pas il y a quinze ans», avoue la dirigeante.
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